La campagne israélienne de bombardements a
fait passer le Hamas en première ligne de la cause palestinienne et lui a
assuré une place à la table des dirigeants de l’OLP.
Le gouvernement d’unité Fatah-Hamas n’aurait été uni
que sur le papier et il serait passé d’une crise à l’autre sous l’égide de
Mahmoud Abbas. Les salaires des 50 000 fonctionnaires de Gaza n’auraient pas
été payés. Le Hamas serait toujours contenu dans une petite boîte appelée Gaza,
sans argent et sans accès au monde extérieur, avec une frontière égyptienne
encore plus hermétique que la frontière israélienne.
La campagne de 46 jours semble avoir changé beaucoup de
choses. Elle a réunifié - au moins temporairement - les factions palestiniennes
bien plus solidement qu’aucun pourparler à Doha n’aurait pu le faire rêver.
Mahmoud Abbas a dû changer de position et passer de la condamnation des tirs de
roquettes du Hamas à l’exigence qu’il soit mis fin au siège. Même s’il est,
sans doute, personnellement fort contrarié du rejet de la proposition
égyptienne, il est obligé, tout comme l’Égypte, de se rapprocher des positions
de la résistance. Il ne peut pas faire autrement.
La campagne israélienne de bombardements a fait passer
le Hamas en première ligne de la cause palestinienne et lui a assuré une place
à la table des dirigeants de l’OLP. Et à l’intérieur du Hamas, l’attaque a
donné plus d’influence au Brigades Ezzedine al-Qassam. Tuer leurs familles a
eu, une fois de plus, l’effet opposé à celui escompté. Personne ne peut dire,
et personne ne le dit à Gaza, que les combattants se terraient lâchement dans
les tunnels pendant que les civils se prenaient les bombes parce que ce sont
leurs civils, leurs femmes et leurs enfants qui ont été les premières victimes.
Abu Ubaydah, le porte parole des Brigades al-Qassam, a
ordonné impérieusement jeudi à la délégation palestinienne de quitter le Caire
et les pourparlers qu’il a qualifiés de danse avec des démons, après la tentative
d’assassinat de Mohammed Deif, le chef de la branche armée.
Le ton qu’il a employé en dit long. Voilà les Brigades
al-Qassam qui disent, non seulement au reste du Hamas mais aux autres groupes
de la délégation ce qu’ils doivent faire. Ils n’ont jamais fait une déclaration
politique aussi forte précédemment. Cela montre au moins leur assurance.
L’autre signe que l’attaque contre Gaza fait des vagues
politiques, ce sont les efforts de l’Europe et des USA pour y mettre fin. Il y
a deux semaines, les 28 ministres des Affaires Étrangères de l’Union Européenne
ont appelé au désarmement de toutes les factions de Gaza, en ligne avec la
position d’Israël, en en faisant la condition pour participer aux pourparlers
en vue d’un accord définitif. Désormais, ils ont compris que la
démilitarisation est impossible et ils proposent une solution plus réaliste, à
savoir une discussion sur la manière d’empêcher le réarmement. Un projet de
résolution de l’ONU préparé par 3 pays européens, la Grande-Bretagne, la France
et l’Allemagne, ne reprend même pas le mot lui-même.
Netanyahou n’est pas près de convaincre l’aile droite
de son cabinet, donc tout ceci est pour l’instant lettre morte. Mais plus la
campagne se prolonge, plus elle aura des conséquence négatives pour Israël.
Soit il lancera une autre offensive, peut-être plus meurtrière encore, au coeur
de la ville de Gaza, et l’armée israélienne a déjà mis en garde contre les
conséquences d'un tel choix. Soit il va falloir qu’il se fasse à l’idée de
mettre fin au siège. C’est un vrai choix d’Hobson*. Israël est coincé. Le Hamas
a réussi à le piéger. Netanyahou n’a jamais voulu une longue guerre et
certainement pas une guerre où les tirs de roquette du Hamas augmentent avec le
temps au lieu de diminuer.
Le troisième round du conflit a débuté comme une chasse
aux trophées. Netanyahou espérait que la tête de Deif lui permettrait de crier
victoire. Mais même si Israël avait réussi à assassiner Deif, cela n’aurait
rien changé. Comme le montre la biographie de Deif, il a commencé en lançant
des pierres et il est devenu le commandant de ce qui est désormais une petite
armée avec son propre arsenal de roquettes. D’autres suivront son exemple.
Les funérailles des trois leaders des Brigades
al-Qassam abattus par la frappe aérienne suivante ont rassemblé à Rafah des
milliers de jeunes Palestiniens qui criaient vengeance. Chaque fois qu’Israël
assassine une génération de leaders du Hamas, une plus efficace encore la
remplace. L’armée du Hamas se renforce à chaque fois.
Mais il n’y a pas que les jeunes de Palestine qui sont
irrésistiblement attirés par la cause de la Résistance, elle attire aussi les
sunnites de tout le monde arabe. C’est une chose qu’Israël devrait prendre au
sérieux. Obtenir le soutien de l’Égypte, de l’Arabie Saoudite et des Émirats
Arabes Unis a pu paraître très malin à Israël sur le court terme. Ces pays
soutenaient déjà discrètement Israël et l’agression contre Gaza n’a fait que
révéler leur soutien au grand jour.
Mais sur le long et moyen terme, on peut douter que
leur soutien soit de quelque secours à un pays entouré de pays arabes sunnites.
Parce que l’agression israélienne a replacé la cause palestinienne au coeur du
conflit qui déchire le monde arabe. Les monarchies du Golfe et les dictatures militaires
qui ont donné leur aval à Israël pour attaquer le Hamas, sont les régimes mêmes
qui ont financé et fomenté les révolutions contre les Printemps Arabes. La
cause nationaliste palestinienne contre l’occupation est assimilée à la lutte
contre les dictatures soutenues par l’Occident.
Les brigades Qassam sont un symbole de résistance qui
dépasse largement Rafah. Elles inspirent aussi la jeunesse égyptienne.
Netanyahou avait-il conscience de ce qu’il allait
déclencher en lançant son offensive ? Sans doute pas, mais la situation a
changé et il va falloir qu’il prenne ces changements en compte s’il veut s’en
sortir. Gaza est devenue sa boîte de Pandore.
Source : Info-Palestine
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire